Ramzy Baroud
          Lorsque l’armée irakienne s’est écroulée après que les troupes  américaines et britanniques aient envahi l’Irak en 2003, la mission de  celles-ci semblait accomplie.         
Indéniablement, 2010 a été une année où l’être humain s’est avéré plus efficace que le matériel militaire.
Mais près de huit ans après le début d’une guerre  destinée, par le  « choc et l’effroi », à soumettre toute une  population, le peuple irakien reste debout. Il a fait face et a rejeté  les occupations étrangères, résisté au sectarisme, s’est opposé au  militantisme sans but et aux actes insensés de terrorisme.
Pour la plupart d’entre nous, la volonté du peuple  irakien ne peut pas être directement constatée mais seulement déduite.  Huit ans de frappes militaires, de raids, d’emprisonnements, de torture,  d’humiliation et de souffrances inimaginables n’ont pas suffi pour  forcer les Irakiens à accepter l’injustice comme statu quo.
En août 2010, les États-Unis ont déclaré la fin des  combats en Irak, promettant un retrait complet d’ici la fin 2011.  Toutefois, l’action militaire américaine s’est poursuivie, même sous des  appellations différentes. L’occupation de l’Irak se poursuit, en dépit  de modifications tactiques et de tentatives de revendre l’occupation.
Mais s’il n’y avait pas eu la ténacité du peuple  irakien, qui réussit à dépasser les clivages sectaires, politiques et  idéologiques, il n’aurait nullement été question de retrait ou de  date-butoir. Il n’y aurait rien de tout cela si ce n’est du pétrole bon  marché qui aurait donné à l’impérialisme un nouvel âge d’or - pas  seulement en Irak, mais dans tout le ainsi nommé tiers monde. Le peuple irakien est parvenu à stopper ce qui aurait pu devenir une dangereuse tendance.
2010 était une autre année durant laquelle les Irakiens  ont tenu bon, et les sociétés civiles dans le monde entier se sont  tenues à leurs côtés dans la solidarité, une solidarité qui continuera  jusqu’à ce que la pleine souveraineté de l’Irak soit reconquise.
La Palestine nous fournit un autre exemple de la solidarité internationale, et qui n’a pas été surpassée dans les temps modernes.  La société civile a finalement franchi la ligne séparant les  déclarations et les sentiments solidaires, et l’action réelle et  directe. Le blocus israélien contre Gaza, soutenu par les Etats-Unis et  quelques autres pouvoirs occidentaux, dépasse la question de la crise  humanitaire. C’est également une crise morale, particulièrement parce  que la population assiégée de Gaza a été soumise à une guerre des plus  brutales à la fin de 2008, suivie de successives frappes militaires  mortelles.
Le long siège qui dure depuis quatre ans a dévasté une  population dont le crime principal est d’avoir exercé son droit  démocratique de voter, et d’avoir refusé de se soumettre aux diktats  militaires et politiques d’Israël.
Gaza reste un exemple brillant de force humaine dans  notre époque. C’est un fait que le gouvernement israélien refuse  d’accepter. Les médias israéliens comme les autres,  ont rapporté que l’armée israélienne déploiera de nouveaux chars  d’assaut pour abattre la résistance du territoire assiégé, avec la  justification que des combattants palestiniens seraient parvenus à  pénétrer avec leurs tirs les blindages d’un char israélien Merkava  censément impénétrable. Gabi Ashkenazi, le lieutenant-général militaire  en chef israélien, qui a révélé ce fait dans une récente session  parlementaire, peut ne jamais comprendre que ni un Mekava (ou un  quelconque nouveau modèle qu’il déploiera bientôt à Gaza) ni le meilleur  matériel militaire où qu’il soit, ne pourront jamais forcer les  blindages de la volonté et de la constance des Palestiniens.
Gaza n’est pas seule. Les responsables de la société  civile représentant chaque religion, nationalité et idéologie ont  inlassablement mené une campagne de solidarité avec le peuple  palestinien. L’ampleur et l’importance de cette solidarité ont été  inégalées ces derniers temps, au moins depuis que les unités des  brigades internationales anti-fascistes ont résolument défendu la  deuxième République espagnole entre 1936-1939.
Cette solidarité a eu un coût. Beaucoup de militants  venus de Turquie et de divers autres pays ont été tués ou  blessés en  plein mer alors qu’ils essayaient de tendre une main amicale vers le  peuple de Gaza et de toute la Palestine.  Aujourd’hui, bien que connaissant les dangers qui les attendent,  beaucoup de militants du monde entier espèrent toujours lever l’ancre  pour Gaza en 2011.
En effet, 2010 était une année où l’être humain s’est  révélé plus efficace que le matériel militaire. C’était une année où la  solidarité humaine s’est retrouvée comme elle ne l’avait jamais fait  auparavant, apportant avec elle beaucoup d’espoir et beaucoup de  nouvelles possibilités.
Mais la célébration de l’espoir ne s’arrête pas à la Palestine  et à  l’Irak. Elle ne fait qu’y commencer. Les champions de la défense  des droits de l’homme sont de toutes les couleurs et de toutes les  croyances. Aung San Suu Kyi de Birmanie, Desmond Tutu  d’Afrique du Sud, l’ancien Président des États-Unis Jimmy Carter et  d’autres héros et héroïnes à travers le monde poursuivront leur mission  de paix et de justice, comme ils l’ont fait depuis de nombreuses années.
Ces noms bien connus sont seulement une partie de  l’histoire. Il y a littéralement des millions de héros méconnus qui  rendent ces années si difficiles plus supportables, et qui continueront à  nous guider à travers les années et des défis encore inconnus.
Haïti a été le pays le plus durement frappé en 2010.  La petite  nation a été secouée le 12 janvier 2010 par un tremblement de terre des  plus catastrophiques, suivi de 52 répliques sismiques. On estime que  plus d’un demi-million de personnes ont été tuées ou blessées, et  beaucoup plus sont restées sans foyer. L’année a fini sur une note  pareillement dévastatrice puisque plus de 2000 personnes sont mortes et  105 000 sont contaminées (selon des évaluations faites par la Pan American Health Organization) après que le choléra se soit répandu sur un pays déjà accablé.
Il est assez étrange de voir comment les principales  puissances peuvent être parfaites et efficaces dans leurs préparatifs de  guerre, et pourtant si scandaleusement lentes dans leurs réponses aux  besoins humains lorsqu’il n’y a pas de prix politique ou économique  pouvant être extorqué. Mais cet écart n’a guère découragé les médecins  et les infirmières de l’Hôpital Saint-Nicolas en Haïti, car malgré le  terrible manque de ressources, ils ont réussi à sauver 90 % de leurs  patients.
Nos pensées vont à Haïti et à son peuple dans ces  moments difficiles. Mais Haïti a besoin de beaucoup plus que de voeux et  de prières solennelles. Il faut aussi des prises de positions  courageuses de la société civile afin de compenser les engagements en  demi-teinte faits par certains gouvernements et dirigeants en mal de  publicité.
Rappelons que l’espoir n’est pas un mot quelconque  servant à évoquer un sentiment temporaire d’attentes positives pour  l’avenir. Pour garder son plein sens, il doit être fondé sur de vraies  valeurs que l’on peut atteindre. Il doit être suivi par l’action. La  société civile doit continuer à se renforcer et à combler les vides  créés ou laissés béants par l’égoïsme des puissances mondiales.
Les mots  ne mettent pas fin aux guerres, n’empêchent pas la cupidité ni ne de  diminuent les ravages causés par les catastrophes naturelles. Mais les  peuples, oui...  Que 2011 soit une année d’action, d’espoir, et du  triomphe ininterrompu de la société civile.
                30 décembre 2010 - Communiqué par l’auteur
Traduction de l’anglais : Claude Zurbach
Traduction de l’anglais : Claude Zurbach