Ghassan Khatib
Israël  Etat juif ? Pour les Palestiniens, "cette demande israélienne, outre  qu’elle affaiblit et préempte certains objectifs légitimes des  Palestiniens, vise à mettre de nouveaux  bâtons dans les roues du  processus de paix "
Bien que les Palestiniens  expriment de manières diverses leur rejet de l’exigence récente de  reconnaissance d’Israël en tant qu’Etat juif que pose le premier  ministre israélien Benyamin Netanyahu, il semble bien qu’il existe un  consensus pour s’y opposer. Quand Netanyahou a récemment réitéré sa  demande comme condition pour mettre en pratique le gel de la  colonisation que réclame la communauté internationale,  deux approches  se sont fait jour côté palestinien.
La première, la plus répandue,  était de rejeter cette  condition pour des raisons de fond. D’abord, l’adoption d’une telle  position affaiblirait l’exigence palestinienne que le droit au retour  des réfugiés soit mis en œuvre en application de la Résolution 194 de  l’Assemblée générale des Nations unies.
Ensuite, une telle position serait néfaste pour les  Palestiniens d’Israël qui composent un cinquième de la population et  sont déjà soumis à toutes sortes d’attitudes et de postures racistes de  la part de la société et de l’Etat lui-même.
Enfin, cette exigence reflète une attitude raciste que les Palestiniens ne peuvent accepter pour de pures raisons morales.
Une autre série de réponses à cette condition posée par  Israël considère qu’il faut la refuser parce qu’elle n’a pas de sens,  puisque l’OLP, partie prenante de tous les accords signés avec Israël, a  déjà reconnu Israël en 1993 tout comme Israël est reconnu aux Nations  unies et  par d’autres Etats dans le monde. Israël ne présentait pas une  telle exigence alors.
Tout cela fait maintenant partie du processus de paix,  où Israël répondit à la lettre de reconnaissance du dirigeant  palestinien, Yasser Arafat, par une lettre du Premier ministre Yitzhak  Rabin reconnaissant l’OLP. C’était la première fois qu’Israël  reconnaissait les Palestiniens comme un people et l’OLP comme son  représentant.
D’autres Palestiniens encore ont répondu à la requête  israélienne en mettant Israël au défi de préciser les frontières sur  lesquelles il veut être reconnu. C’est un défi auquel il est difficile  qu’Israël réponde parce qu’il n’a jamais précisé quelles étaient ses  frontières –ni avant ni après l’occupation illégale de la bande de Gaza  et de la Cisjordanie, dont Jérusalem-Est.
En bref, l’assomption implicite chez les Palestiniens  est que cette demande israélienne, outre qu’elle affaiblit et préempte  certains objectifs légitimes des Palestiniens, vise à mettre de nouveaux   bâtons dans les roues du processus de paix que les Etats-Unis et la  communauté internationale essaient de mettre en route. La raison en est  que la politique de l’actuel gouvernement de droite est totalement  incompatible avec le  consensus international et les stipulations des   résolutions du Conseil de Sécurité. Ainsi, le gouvernement israélien  fait tout ce qu’il peut pour éviter de s’engager dans des négociations  en ajoutant chaque jour des pré-requis ou des obstacles.
Il n’est pas habituel de reconnaitre les Etats sur une  base religieuse ou ethnique, mais plutôt sur la base de leur  caractère  national. Ce sont les Nations unies et le droit international qui  devraient être les références dans  ce processus. Ainsi il est temps que  la communauté internationale - dirigée par les Etats-Unis - mettre  Israël devant le choix suivant : Ou Israël accepte de s’engager  sérieusement à négocier un accord final avec les Palestiniens sur la  base d’accords définis, la feuille de route et les résolutions  pertinentes du Conseil de sécurité ; Ou bien la communauté   internationale joue un rôle direct en aidant les Palestiniens à  matérialiser leur Etat indépendant, à la fois en continuant à aider le  gouvernement palestinien dans ses efforts pour construire les  institutions de l’Etat et se préparer à l’indépendance, et en adoptant  le moment venu une résolution du Conseil de sécurité qui reconnaitra  l’Etat palestinien sur les frontières de 1967.
Alors que les Palestiniens préfèrent la première option,  qu’ils  jugent prioritaire, il faut faire comprendre à Israël que la  paix basée sur deux Etats ne peut toujours rester otage des caprices de  l’occupant. Israël lui non plus n’a pas été établi par un accord entre les parties  mais par une série de combinaisons des institutions de l’Etat que les  groupes juifs réussirent à établir sous le mandat britannique, et par la  résolution 181 d l’Assemblée générale des Nations unies  qui partagea  en deux Etats la Palestine historique.
Publié par bitterlemons 25/10/2010
traduction et Intro : C. léostic, Afps