M. Saadoune
Le Quotidien d’Oran
Face à un Etat israélien agressif et belliciste, les trêves finissent  toujours par être rompues. Les affrontements qui ont eu lieu mardi entre  des soldats libanais et israéliens le confirment amplement. Hier, le  ton était à l’accalmie, mais l’événement qui a fait trois morts  libanais, deux soldats et un journaliste, et un lieutenant-colonel de  l’armée israélienne est instructif.  
En la matière, deux ou  trois enseignements sont déjà tirés par les états-majors d’un  Proche-Orient où les bruits de bottes se font de plus en plus clairement  entendre. Le premier des enseignements est qu’à la « surprise »  d’Israël, l’armée libanaise a eu un comportement d’armée nationale.
Face à une provocation israélienne, l’armée du pays du  cèdre a réagi. Et elle a fait savoir, par le biais d’un de ses  porte-parole, que toute nouvelle agression israélienne sera suivie d’une  réponse appropriée. « La riposte sera la même en cas de n’importe  quelle agression à la frontière contre le Liban », a affirmé le  porte-parole militaire en référence aux heurts. « Toute agression sera  lourde de conséquences ».
La zone concernée est une délimitation frontalière  contestée par le Liban et en principe toute action susceptible d’y être  entreprise doit l’être sous la supervision de la Finul. C’est cela qui  s’est passé, hier, pour le déracinement des arbres qui gênaient les  observations des Israéliens. Mardi, l’armée israélienne a agi de manière  unilatérale comme si elle voulait tester l’armée libanaise qui fait  l’objet depuis quelques mois d’une campagne israélienne soutenue en  direction de la France et des Etats-Unis pour que ces pays ne lui  fournissent pas d’armes.
Une opportunité pour les Etats arabes
L’armée israélienne qui peut compter sur la Finul  découvre que l’armée libanaise ne considère pas le Hezbollah comme un  ennemi mais qu’elle entretient de bonnes relations avec l’organisation  de résistance. Ehud Barak vient d’ ailleurs de renouveler son appel -  son injonction - aux Américains et aux Français de cesser de livrer des  armes à l’armée libanaise. Le ministre de la Défense israélien a déploré  que les Etats-Unis et la France « aient fourni des armes sophistiquées  au Liban, qui ont été utilisées lors des heurts de mardi et qui  pourraient tomber dans les mains du Hezbollah ». Barak est habitué à ce  genre d’admonestation. Il y a quelques jours, il avait osé, comme s’il  avait un droit de véto, critiquer la nomination du chef des services de  renseignements turcs, provoquant une réaction sèche et sans équivoque  d’Ankara. Peut-on espérer que les Etats arabes vont décider de s’occuper  directement de l’armement de l’armée libanaise au lieu de laisser des  Etats sous influence du lobby sioniste le faire ? On le souhaite, mais  on peut en douter...
 Les Etats arabes ont une opportunité réelle de soutenir  le Liban. A plus forte raison quand son armée démontre qu’elle ne  restera pas les bras croisés devant les agressions israéliennes que la  très ambiguë Finul ne veut pas voir. C’est d’ailleurs le second  enseignement important de « l’incident » frontalier : la Finul n’est pas  neutre, elle est là pour relayer l’armée israélienne et servir  exclusivement Israël. La presse libanaise est, de manière quasi unanime  et à juste titre, très sévère à l’égard de la Finul. Le journal Es Safir  constate que les forces de la Finul « ont battu en retraite, quitté les  lieux des combats et observé de loin le cours des événements ». La même  Finul n’hésitait pourtant pas, à la grande colère des villageois  libanais, à se livrer à des descentes de reconnaissance dans les  villages libanais. Quand aux incursions israéliennes, cette force très  partisane ne les voit pratiquement jamais.
L’unité nationale ciblée
Aucun Libanais n’a donc été surpris d’entendre la Finul  affirmer que les arbres objet de l’incident se trouvent en territoire  israélien. De fait, au-delà de la Finul, l’événement vient de rappeler  que les institutions internationales - Conseil de sécurité, Tribunal  international - font l’objet d’une redoutable instrumentalisation contre  l’unité du Liban.
Ainsi l’incrimination annoncée de membres du Hezbollah  par le tribunal ad hoc ne surprend que ceux qui veulent bien l’être. Car  la cible évidente de ces manœuvres est bien entendu le parti de Hassan  Nasrallah. Mais comme ce mouvement de résistance représente réellement  une très forte proportion de la population libanaise, c’est bien l’unité  du pays qui est ciblée. D’autant que la ligne de fracture entre  soutiens à la résistance et partisans du rapprochement avec Israël ne  recoupe pas les frontières confessionnelles. L’armée libanaise,  multiconfessionnelle et creuset du patriotisme en est l’exemple vivant.  Le fait qu’Israël mène campagne contre l’armée libanaise n’est donc pas  un hasard. Le démantèlement de réseaux d’espionnage israélien le montre,  l’armée libanaise se place résolument dans une logique de sécurité  nationale.
Elle ne se trompe pas d’ennemi. A plus forte raison,  quand il s’agit d’un ennemi qui se prépare ouvertement à essayer de  faire oublier son échec de l’été 2006. Mais les Israéliens le savent,  s’ils peuvent déraciner quelques arbres, ils auront bien plus de mal à  en faire autant avec la résistance libanaise, l’armée libanaise et les  patriotes de ce pays. Face à un ennemi disposant des moyens de ses  alliés impériaux, les Etats arabes commettraient une autre funeste  erreur en oubliant le Liban.
 Ils doivent soutenir économiquement le pays, bien  entendu et c’est bien là la moindre des choses. Mais ils doivent déjà  agir énergiquement pour que l’armée libanaise dispose des moyens  nécessaires pour faire face à l’arrogance d’Israël.
                                  6 août 2010 - Le Quotidien d’Oran - Vous pouvez consulter cet article à : 
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