K. Selim  - Le Quotidien d’Oran
A la surprise, feinte ou sincère, de beaucoup de dirigeants  occidentaux, le président brésilien Lula da Silva et le Premier ministre  turc Recep Tayyip Erdogan ont réussi à négocier un accord avec le  président Ahmadinejad sur le nucléaire iranien.         
Le président bésilien Lula [à g.] et le  président iranien Ahmadinejad
La mission diplomatique de la dernière chance - avant le  durcissement annoncé des sanctions par le Conseil de sécurité de l’ONU -  partait pourtant sous des auspices défavorables. La secrétaire d’Etat  US Hillary Clinton, qui revendique ses relations affectives avec Israël,  estimait à 30% les chances de succès de l’initiative brésilienne et le  Russe Medvedev exprimait sur un mode moins acide son scepticisme. A  l’issue de dix-huit heures de négociations, selon un membre de la  délégation brésilienne, les dirigeants iraniens ont accepté les termes  d’un accord voisin de celui proposé par les Occidentaux.
L’accord signé dimanche prévoit - la différence avec le  projet occidental n’est pas anodine - que le stock de 1.200 tonnes  d’uranium faiblement enrichi détenu par Téhéran soit transféré en  Turquie, et non plus en Russie ou en France, pour enrichissement à un  niveau compatible avec un usage « civil ».
Bien entendu, le succès des diplomaties brésilienne et  turque fait grincer les dents des va-t-en-guerre de Tel-Aviv et suscite  la méfiance des néoconservateurs du Nord, à l’image de la baronne  Ashton, en charge des Affaires étrangères européennes.
Ce que montre l’accord de Téhéran est qu’en matière  diplomatique et de relations internationales, la confiance est un  facteur primordial. Les Iraniens, instruits par l’Histoire et les  agissements occidentaux dans la région, étaient plus que réticents à  confier leur stock de matières fissiles à des pays dont l’impartialité -  ou la fiabilité - est discutable.
Les Iraniens ne cachaient pas leur méfiance à l’égard  de la France et répugnaient à lui livrer une partie de leur uranium,  d’autant que Paris a installé, il y a quelques mois, une importante base  avancée aux Emirats, à quelques dizaines de kilomètres de la frontière  iranienne. Le discours officiel vis-à-vis de l’Iran apparaît, depuis  l’élection de Nicolas Sarkozy, certainement plus hostile qu’au cours des  présidences précédentes.
La Russie, partagée entre une ligne de redressement  national et le désir d’être reconnue comme une puissance par les  Occidentaux, se révèle comme un partenaire à la fiabilité incertaine.  Les tergiversations de Moscou sur la fourniture d’armes défensives à  l’Iran ont convaincu, s’il en était encore besoin, que la Russie était  très sensible aux pressions de l’Ouest et encore incapable d’affirmer sa  position globale.
Le dilemme iranien, qui consistait à éviter  l’aggravation des sanctions tout en bénéficiant d’assurances solides sur  son uranium, était difficile à trancher dans un contexte où, seule  parmi les puissances, la Chine s’oppose à l’accentuation de l’isolement  du pays des ayatollahs.
Signe précurseur de la multipolarité à venir, le rôle  des diplomaties brésilienne et turque a permis de sortir d’un  face-à-face stérile et dangereux entre un pays naturellement jaloux de  sa souveraineté et une coalition occidentale qui considère la guerre  comme le moyen usuel d’affirmation de sa suprématie.
Il reste au Conseil de sécurité, dominé par l’Ouest,  d’entériner ou non l’accord de dimanche dernier. Les jours qui viennent  montreront donc la réalité des intentions occidentales. Lula et Erdogan  mettent les Occidentaux à l’épreuve dans un dossier nucléaire iranien  saturé de mauvaise foi.
18 mai 2010 - Le Quotidien d’Oran - Vous pouvez consulter  cet article à : 
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