Pierre Stambul
          Il y a plus de 60 ans, 800000 Palestiniens ont été expulsés de  leur propre pays au terme d’un « nettoyage ethnique » délibéré et  organisé par les dirigeants et l’armée du nouvel État israélien.         
          Des vérités simples
Il n’y aura pas de paix au Proche-Orient sans la  reconnaissance de ce « crime fondateur » (sur le mode de la  reconnaissance du caractère criminel de l’Apartheid pour sortir de la  guerre en Afrique du Sud) et sans un examen sérieux des moyens de  « réparer », ce qui passe entre autres par le droit au retour de tous  les réfugiéEs et de leurs descendantEs. Il n’y aura pas de paix hors des  droits fondamentaux : droit des peuples, égalité des droits politiques  et économiques, refus de toutes les formes de discrimination, de  domination, d’occupation, de colonialisme. Il n’y aura pas de paix dans  le mensonge ou l’amnésie. Les responsables des crimes de guerre et des  crimes contre l’humanité commis contre les PalestinienNEs devront rendre  compte de leurs actes et donc être jugés et punis.
Il n’y aura pas de paix dans la manipulation de  l’histoire. Dans cette guerre, il y a un occupant et un occupé. Les  victimes, ce sont les PalestinienNEs. Certes, le monde chrétien est  responsable d’un crime majeur, l’antisémitisme, et un régime politique  européen a commis « l’indicible » : le génocide nazi, l’extermination  méthodique de la moitié des Juifs européens. Faire payer ce crime par le  peuple palestinien est totalement insensé et scandaleux.
Dans la guerre du Proche-Orient, il n’y a aucune  « symétrie » possible entre un camp et l’autre avec la mise en cause  « des extrémistes des deux camps ». Le revenu moyen en Israël est 20  fois plus élevé qu’en Palestine. Depuis 60 ans, la Palestine est niée,  occupée, humiliée, spoliée, massacrée, détruite en toute impunité.  Aucune paix n’est possible sans la reconnaissance et la fin de cette  situation.
Arrêter de faire fausse route
Toutes les tentatives pour faire la paix depuis des  années n’ont pas échoué par hasard. Involontairement, la direction  palestinienne en est un peu responsable. En 1988, elle a accepté de  reconnaître l’Etat d’Israël sur 78% de la Palestine historique, ce qui  était compréhensible à cette époque. Elle a voulu croire à Oslo que la  « paix des braves » basée sur l’idée « la paix contre les territoires »  était possible. C’était méconnaître totalement ce qu’est le sionisme.
Les instances internationales portent une lourde  responsabilité. En 1947, l’ONU a voté un partage de la Palestine qui  rendait les Palestiniens étrangers sur plus de la moitié de leur pays.  L’ONU a voté la reconnaissance de l’Etat d’Israël le 15 mai 1948 alors  que 375000 PalestinienNEs avaient déjà été expulséEs.  Elle a accepté Israël alors que cet Etat naissant violait dès le départ  une clause majeure des accords d’armistice : dès 1949, les biens et les  terres des PalestinienNEs expulséEs étaient confisquéEs, les villages  étaient rasés et le refus du retour des expulséEs et de leurs  descendantEs devenait définitif.
Chaque fois que l’ONU ou une autre instance  internationale a condamné Israël, aucune mesure n’a été entreprise pour  imposer cette décision. Au contraire, la caution internationale apportée  à des mesures comme le blocus de Gaza pour punir les PalestinienNEs  d’avoir « mal » voté, a eu des conséquences tragiques. La caricature de  l’attitude de l’ONU, c’est la FINUL au Liban.
À deux reprises, elle a laissé passer l’envahisseur  israélien sans tirer un seul coup de feu. Elle ne s’en est pris ...  qu’aux Libanais.
L’ONU a fait crédit à Israël de la Nakba (la  catastrophe) de 1948. Par contre, elle n’a pas reconnu la conquête de  1967. Toute une partie du mouvement de solidarité s’est engouffrée dans  cette distinction et joue la « légalité » en exigeant le retour d’Israël  à ses frontières d’avant 1967 et la création d’un Etat Palestinien  « aux côtés de l’Etat d’Israël avec Jérusalem Est comme capitale ». Bien  sûr, si demain la paix était signée sur cette base, ce serait  formidable. Mais c’est totalement irréaliste. Il serait temps d’examiner pourquoi cette stratégie qui était celle  d’Oslo a définitivement échoué.
Parce que ceux qui la prônent sont incapables de  comprendre ce qu’est le sionisme. Cette idéologie n’est pas seulement  une forme particulière de nationalisme et de colonialisme. C’est aussi  un messianisme perverti qui a créé une histoire et une identité  mythique, qui a fabriqué un « homme nouveau » avec la théorie fumeuse du  « peuple en exil qui a fait son retour ». Le sionisme ne s’est pas  achevé en 1948 au contraire. Il est plus que jamais à l’œuvre et il ne  laissera jamais la moindre place à l’identité palestinienne. Son modèle,  ce sont l’Australie ou les Etats-Unis où les peuples indigènes ont été  tellement marginalisés qu’ils ne sont plus en capacité de réclamer leurs  droits.
Une partie du mouvement de solidarité fait aussi fausse  route sur la question légalité/légitimité. La Naqba était totalement  illégitime. La création d’un Etat Juif où celles et ceux qui peuvent se  réclamer de cette identité jouissent de tous les droits face aux non  juifs qui en sont privés est illégitime. Elle est à la base d’une  véritable situation d’Apartheid vécue par les 20% de citoyenNEs  israéliens qui ne sont pas juifs et qui vivent de graves discriminations  (possession de la terre, logements, emploi, éducation ...). Israël est  une démocratie pour les Juifs mais une dictature impitoyable pour les  PalestinienNEs. Les institutions créées au début du XXe siècle (le KKL,  l’Agence Juive, la Histadrouth...) pour aboutir à une société  « ethniquement pure » sont illégitimes. Dire cela ne signifie évidemment  pas « les Juifs à la mer » (d’autant que pour l’instant, ceux qui ont  été jetés à la mer, ce sont les PalestinienNEs, en 1948). On joue sur  les mots en agitant la peur sur le thème « vous voulez rayer Israël de  la carte ? ». Qu’on trouve une solution à cette guerre sur la base d’un  ou deux Etats, tous les citoyenNEs devront avoir les mêmes droits. Donc  l’idée de préserver à tout prix le « caractère juif » de l’Etat d’Israël  est totalement contreproductive.
Au contraire, il n’y aura pas de paix si la société  israélienne ne devient pas une société « normale » et laïque, donc ayant  dépassé le sionisme ou s’en étant débarrassé. Bref, « l’Etat Juif » est  illégitime. La présence du peuple israélien au Proche-Orient n’est pas  en cause. Mais elle ne sera possible à terme que sur la base d’une  totale égalité des droits dans la région.
Sauver Palestiniens et Juifs du  sionisme
Dans cette guerre comme dans d’autres, les manipulations  de l’histoire, de la mémoire ou de l’identité jouent un rôle clé.
Pour faire court. La Palestine a toujours été peuplée  dans l’Antiquité par des peuples divers avec des religions diverses :  Hébreux bien sûr (qui sont un peuple autochtone) mais aussi Cananéens,  Iduméens, Moabites, Philistins. Le récit biblique sur lequel les  sionistes (dont les fondateurs étaient non-croyants) se sont basés pour  justifier un projet colonial est largement mythique. Le « royaume  unifié » de David et Salomon que les sionistes sont supposés avoir  recréé n’a probablement jamais existé.
Comme l’explique Shlomo Sand, la théorie sioniste de  l’exil et du retour est largement une fiction. C’est la religion juive  qui s’est dispersée, pas le peuple. Les Juifs d’aujourd’hui sont  majoritairement descendants de convertiEs et les descendantEs des  Hébreux de l’Antiquité sont essentiellement ... les Palestiniennes.
Il n’y a pas de trace en pays musulman avant 1900 de  persécutions antijuives comparables à ce que les Juifs ont subi dans le  monde chrétien. Le christianisme a produit contre les Juifs les  interdits divers (la possession de la terre, les interdits  professionnels ...), les stéréotypes racistes, l’accusation de déicide,  l’enfermement (juderias, ghettos ...), les pogroms. La sortie  progressive des Juifs européens du ghetto à partir du XVIIIe siècle a  transformé l’antijudaïsme chrétien en antisémitisme racial, les Juifs  personnifiant l’obstacle au rêve nationaliste fou de construction  d’Etats « ethniquement purs ».
Au départ, le sionisme est une réponse (minoritaire) à  l’antisémitisme que subissent les Juifs européens, principalement dans  l’empire russe où vivent la majorité des Juifs. Pour les sionistes,  l’antisémitisme est inéluctable et les luttes pour la citoyenneté ou  l’égalité des droits n’ont aucun sens. Selon eux, les Juifs ont été,  sont, et seront toujours persécutés.
Les sionistes inventent une théorie de la séparation.  Ils inventent aussi une théorie fantastique, celle de l’exil et du  retour qui existait depuis longtemps dans le monde protestant. Chez ces  « chrétiens sionistes » (par ailleurs antisémites) très puissants en  particulier aux Etats-Unis, les Juifs doivent revenir en Terre Sainte  pour éliminer le mal (= les Arabes) avant de se convertir sous peine de  disparition. Les sionistes instrumentalisent le récit biblique pour conquérir la  Palestine. À cette époque, le colonialisme est accepté par tous les  courants idéologiques qui y voient un progrès de la civilisation. Dès le  départ, le sionisme est totalement négationniste vis-à-vis du peuple  autochtone, de son histoire, de son identité, de ses droits.
Un siècle plus tard, rien n’a changé. Les Palestiniens  sont décrits comme des intrus et des envahisseurs. D’ailleurs, on ne  parle pas des Palestiniens, mais des « arabes ». Pour les sionistes, les  seuls propriétaires légitimes du pays sont les Juifs. La religion est  instrumentalisée pour imposer ce discours.
Le colonialisme sioniste recevra une aide significative  de la plupart des dirigeants européens. Ceux-ci y voient plusieurs  profits. D’abord celui de se débarrasser des Juifs européens qui sont  considérés à l’époque comme inassimilables. Curieusement, dès qu’ils  arrivent en Palestine, ces Juifs redeviennent « des Européens » qui vont  installer un morceau d’Europe au Proche-Orient. Balfour était  représentatif de cette conception, à la fois colonialiste et antisémite.
Le sionisme est un nationalisme curieux qui a inventé la  notion de « peuple juif », voire de race juive, là où il y avait une  communauté de destin liée à la religion parmi des populations d’origines  et de cultures très diverses. C’est un colonialisme très particulier  puisqu’il ne vise pas à asservir ou à exploiter le peuple indigène, mais  à l’expulser (la fameuse théorie du « transfert ») et à le remplacer.
Ainsi le syndicat Histadrouth ne défend pas les  travailleurs mais le « travail juif », c’est dans ses statuts. Cela  explique qu’il ait brisé la grève générale palestinienne de 1936 ou  qu’il ait escroqué les centaines de milliers de travailleurs  palestiniens employés en Israël avant l’Intifada et jamais indemnisés de  leurs cotisations sociales.
Le sionisme est un messianisme perverti. Il a fabriqué  le projet fou de regrouper tous les Juifs en Israël, ce qui ne laisse  aucune place pour les Palestiniens. Il a contribué de façon décisive à  déraciner les Juifs du monde arabe de leurs pays où ils n’avaient pas  subi de persécutions. Il n’y a pas de « sionisme de gauche », même si la plupart des premiers  sionistes se disaient socialistes. Depuis 80 ans, la droite sioniste  affiche ouvertement ses « valeurs » : « transférer » les Palestiniens,  coloniser tout le pays entre Méditerranée et Jourdain. La « gauche »  sioniste ne fait rien d’autre : elle a conçu et réalisé l’expulsion de  1948, la guerre impérialiste de 1956 ou la colonisation à partir de  1967.
La parenthèse de Rabin n’en était pas vraiment une,  puisque, entre la signature des accords d’Oslo et son assassinat, Rabin a  installé 60000 nouveaux colons. Des travaillistes comme Ben Eliezer,  Peretz ou Barak portent une responsabilité décisive dans la construction  du mur, la guerre contre le Liban et le massacre de Gaza. Résultat, les  valeurs morales se sont écroulées en Israël et une nette majorité de la  population approuve la colonisation et réclame même que les  PalestinienNEs d’Israël soient privéEs du droit de vote.
Le sionisme est une réponse fausse à l’antisémitisme.  Comme les antisémites, les sionistes pensent que le mélange et le  « vivre ensemble » sont impossibles. Il n’y a pas de « culpabilité » de  l’Occident sur la question du génocide nazi. Il y a eu consensus en 1945  pour dire que la « question juive était finie puisque les Juifs avaient  leur pays ». L’Occident s’est débarrassé de son crime sur le dos du  peuple palestinien en envoyant les rescapés, y compris ceux qui  préféraient aller ailleurs, en Israël. Du coup cet Etat s’est transformé  en tête de pont de l’impérialisme dans la région où il multiplie les  crimes de guerre.
60% des Juifs du monde entier ne vivent pas en Israël.  Ils sont sommés d’être des complices d’un Etat criminel. Faute de quoi  ils sont dénoncés comme « Juifs traîtres ayant la haine de soi ». Le  sionisme n’est pas seulement criminel pour la Palestine. Il est une  impasse suicidaire pour les Israéliens et pour les Juifs. Personne ne  peut penser que cette politique de massacres périodiques et de  négationnisme vis-à-vis de la Palestine pourra se prolonger indéfiniment  et impunément.
Sionisme et antisémitisme sont complémentaires et se  nourrissent l’un l’autre. Ils partagent des valeurs communes, en  particulier le racisme et le refus du « vivre ensemble ». Le « complexe  de Massada », l’idée que toute alternative à la politique actuelle  signifie « Les Juifs à la mer » est le moteur qui fait fonctionner la  société israélienne.
Pendant longtemps, les figures dominantes du judaïsme  sous toutes ses formes évoquaient l’émancipation et l’universalisme.  C’étaient Rosa Luxembourg, Albert Einstein, Hannah Arendt, Sigmund  Freud, Marek Edelman ou des anticolonialistes comme Abraham Serfaty et  Henri Curiel.
Le sionisme a fonctionné comme un effaceur de cette  histoire. Les dirigeants d’Israël sont aujourd’hui des brutes épaisses  comme Lieberman ou Nétanyahou. Sans oublier qu’un ancien premier  ministre, Shamir, a été un collabo qui fit assassiner des soldats  britanniques jusqu’en 1943.
Ce renversement de l’histoire récente du judaïsme  aboutit à une monstruosité : des antisémites américains financent  aujourd’hui la colonisation et Israël est à l’avant-garde de la « guerre  du bien contre le mal ». Le sionisme s’est emparé de façon éhontée de la mémoire du génocide. Il  est temps que le travail de recherche sur l’histoire, la mémoire et les  identités juives ou sur l’histoire palestinienne soit diffusé et rendu  accessible à touTEs pour sortir les Israéliens de leur névrose  collective et de leur fuite en avant coloniale.
Illusions et responsabilités
En 1982, des centaines de milliers d’Israéliens avaient  manifesté pour protester contre la tuerie de Sabra et Chatila. Cette  période est terminée. Il n’y a plus l’espoir qu’ait lieu une « rupture  du front intérieur » en Israël sans une très forte pression de  l’extérieur. Cette société ne souffre pas de la crise et est trop minée  par le racisme, la violence et le complexe de Massada.
Les intellectuels qui parlent pour cet ancien courant  pacifiste (« La Paix Maintenant ») ont approuvé sans état d’âme les  guerres contre le Liban et Gaza. Il est illusoire de placer ses espoirs  dans un compromis avec une « gauche sioniste » à visage humain. Il est  vain d’espérer un remake du processus d’Oslo qui préserverait les  institutions d’un Etat d’Israël, celui-ci acceptant de se retirer sur  les frontières d’avant 1967. Les forces qui obligeraient les 500000  Israéliens établis en Cisjordanie ou à Jérusalem Est de partir ou  d’accepter la citoyenneté palestinienne n’existent pas.
Faut-il placer ses espoirs dans Obama ? Pour des raisons  géostratégiques évidentes, il n’y aura pas de rupture de l’alliance  avec les Etats-Unis. Bien sûr Nétanyahou et Obama se détestent et chacun  souhaite que l’autre soit remplacé au plus vite. Nétanyahou adopte la  position qui a toujours été celle du mouvement sioniste : préserver et  consolider le fait accompli et attendre tranquillement. Obama a les  moyens d’interdire une guerre contre l’Iran mais pas ceux qui  pousseraient les Israéliens à un retrait.
Pour imposer ce retrait, il faudrait sanctionner  politiquement, économiquement et militairement Israël. Il n’existe  aucune force aux Etats-Unis décidée sur cette stratégie. En tant que  citoyens européens soutenant les droits du peuple palestinien, nous  n’avons pas à choisir qui sont les bons ou les mauvais Palestiniens,  mais nous pouvons dire à nos amis palestiniens qu’il n’y a aucun espoir  dans une « Pax Americana » qui ne leur offrira au mieux que quelques  bantoustans appelés Etat Palestinien.
 Fondamentalement, l’Occident n’a pas besoin d’un Israël  en paix avec la Palestine et avec ses voisins. Le pays tel qu’il est,  forteresse avancée de l’Occident dépensant 75% de son PIB dans tout ce  qui concerne l’armée, la « sécurité », l’espionnage ... et garantissant  la mainmise sur les richesses de la région, convient tout à fait aux  dirigeants occidentaux.
Une partie du mouvement de solidarité avec la Palestine  se trompe, je n’ai pas peur des mots. Elle atténue terriblement la  critique sur la nature de l’Etat d’Israël en oubliant qu’au départ la  Nakba est totalement illégitime. Elle a tendance à reprendre la  diabolisation du Hamas ou du Hezbollah. Elle a peur d’utiliser les mots  « colonialisme », « apartheid » pour caractériser l’occupation et les  discriminations. Comme si ce que l’Etat d’Israël inflige à la Palestine  n’était pas aussi grave que ce que l’ancienne Afrique du Sud a fait.  Elle s’abrite derrière la légalité internationale pour ne plus exiger  l’égalité des droits.
Elle reprend certaines terminologies de l’occupant sur  les droits, la légitimité ou la sécurité d’Israël. Elle voudrait nier la  nécessité du boycott ou le limiter aux produits des territoires occupés  (ce qui est techniquement impossible), comme si l’Etat israélien était  innocent de l’occupation.
Elle reste fondamentalement nostalgique du processus  d’Oslo et voudrait le ressusciter. Le slogan « deux peuples deux États »  est devenu un slogan creux qui enferme un prétendu « processus de  paix » dans les interminables discussions sur la sécurité de l’occupant  et qui nie la réalité : il n’y a plus de frontière, l’annexion de la  Palestine n’est plus rampante, c’est un rouleau compresseur accumulant  jour après jour les faits accomplis.
Et puis une Palestine réduite à 22% de la Palestine  historique quand il y a 50% de Palestiniens entre Méditerranée et  Jourdain, c’est peut-être une issue possible, mais ça n’a rien à voir  avec l’égalité des droits ou avec une paix juste.
Le BDS (boycott, désinvestissement,  sanctions) est aujourd’hui la principale arme qui nous reste pour  mettre fin à la destruction de la Palestine. Les Palestiniens  ont tout essayé : la lutte armée, la négociation, la résistance non  violente.
Ce sont les ONG, les associations, les syndicats et de  façon générale la société civile qui permettent aujourd’hui au peuple  palestinien de survivre malgré la division voulue et obtenue par  l’occupant. L’appel au BDS initié par la société civile palestinienne  est aujourd’hui repris partout dans le monde et il a obtenu des succès  non négligeables.
Des syndicats l’ont repris, des multinationales comme  Véolia ou Dexia ont dû se retirer des territoires occupés et même deux  pays (Venezuela et Bolivie) ont rompu les relations diplomatiques avec  Israël pendant le massacre de Gaza.
Face à la lâcheté ou à la complicité de la « communauté  internationale » et de nombreux dirigeants arabes (comme Moubarak), le  BDS est notre arme.
Personnellement, je suis pour toutes les formes de BDS,  boycott politique, économique, commercial, sportif, scientifique,  culturel. Bien sûr, le BDS ne ruinera pas l’économie israélienne qui est  florissante (+105% pour la Bourse de Tel-Aviv qui flambe depuis le  massacre de Gaza).
 Notre BDS ne touchera pas les ventes de drones, la  collaboration informatique ou la fabrication de « villes sécurisées ».  Mais il faut comprendre qu’Israël a une économie mondialisée, que 15% de  sa population vit à l’étranger et que nous avons les moyens de  provoquer de très sérieuses fêlures dans « l’image » d’Israël, prélude à  son isolement.
Nous pouvons faire en sorte que les Israéliens qui  voyagent ou ici, les politiciens qui soutiennent Israël, soient  interpellés en permanence.
Nous devons soutenir toutes les initiatives juridiques.  Le tribunal Russell bien sûr même s’il n’est que symbolique. Il  contribue à révéler à l’opinion le vrai visage d’un Etat qui se dit  démocratique et dont les dirigeants ont commis, comme le juge Goldstone  l’a établi, de nombreux crimes.
Même si on peut avoir les pires doutes sur les instances  internationales, il faudra bien que la Cour Pénale Internationale  inculpe et poursuive les dirigeants politiques et militaires israéliens.  Au nom de quoi cette justice internationale qui poursuit les crimes de  guerre en Bosnie, au Rwanda ou au Congo se désintéresserait-elle des  massacres commis à Gaza ?
Face à la lâcheté ou à la complicité des Etats, ce sont  les sociétés civiles, là-bas comme ici, qui peuvent débloquer la  situation et remettre au premier plan les vraies questions : une paix  fondée sur l’égalité des droits, le refus du colonialisme.
Poser la question du sionisme n’est pas une coquetterie  ou un luxe. Il n’y a pas d’espoir de paix juste ou de rupture du front  intérieur en Israël tant que cette idéologie sera à l’oeuvre.
Cet article n’engage que son auteur.