Pierre Galand
Ce sont les démocrates américains eux-mêmes qui ont organisé l’impasse de Gaza ; ils ont créé les conditions qui ont permis, une fois encore, fin 2008 début 2009, l’offensive israélienne contre Gaza. Les Européens s’inscriront eux aussi dans le même scénario.
Pierre Galand, ABP
Comment cela ? La première étape s’est traduite par l’exigence américano-européenne exprimée à M. Abbas d’organiser ladite Autorité palestinienne en démocratie élective. L’objectif était clairement de tourner la page de l’ère Arafat et du mouvement de libération nationale l’OLP. Le président n’était plus celui de l’OLP mais celui, élu, de l’AP. Les élections suivantes, communales et législatives, allaient encore accroître le fossé entre le mouvement de libération nationale et le modèle dit de démocratie élective imposé par les Occidentaux à un non État.
L’ancien président Carter et sa fondation d’une part, le Parlement européen d’autre part, étaient chargés d’encadrer le processus législatif auquel les forces politiques palestiniennes s’étaient, selon le cas, soit résignées soit ralliées.
Et les élections eurent lieu à tous les échelons avec un sérieux exceptionnel. Tous les observateurs en conviennent, la Fondation et Jimmy Carter lui-même confirmèrent avec force la régularité du processus électoral, des votes et du dépouillement. Tant aux élections communales qu’aux législatives, le Hamas avait donc gagné à la régulière. Cependant, pour les États-Unis comme pour l’ensemble des pays européens qui avaient financé l’organisation de ces élections, les résultats qui en étaient démocratiquement issus étaient devenus inacceptables. Les Palestiniens avaient certes démocratiquement élu un mouvement que les USA et l’UE avaient conjointement placé sur la liste des organisations terroristes après le 11 septembre 2001.
Depuis, le soin mis par les États Unis et les Européens à faire échouer toute issue pour un gouvernement d’unité nationale palestinien relève d’une stratégie particulièrement machiavélique. Tout a été fait pour non seulement disqualifier le Hamas mais aussi manipuler l’AP de M. Abbas et le Fatah. Ainsi, en finançant à tour de bras le Fatah, le perdant des élections (et qui dit finances dit souvent aussi corruption), il n’y a rien d’étonnant à ce que les Palestiniens se soient trouvés au bord de la guerre civile.
Mais il n’y a surtout rien d’étonnant à ce que les gouvernements israéliens successifs, Olmert, Netanyahou, aient été convaincus d’avoir le feu vert pour accomplir eux-mêmes la sale besogne, celle qui leur fera croire, comme au Liban en 2006, en la possibilité d’écraser par la force brutale les légitimes revendications des Palestiniens comme des Libanais à pouvoir vivre sans ingérence extérieure d’Israël et des Occidentaux dans leur pays ou dans ce qui devrait l’être, s’agissant de la Palestine.
Rien d’étonnant non plus, même s’il s’agit ce faisant de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, qu’Israël puisse poursuivre sa politique de blocus à l’encontre de Gaza et se voie assuré de toutes les protections possibles pour éviter de devoir répondre des crimes commis durant l’opération « Plomb durci ».
Le sort réservé, depuis la fin de cette offensive contre Gaza, tant au rapport du juge Goldstone que de ceux de nombreuses ONG de Droits de l’Homme témoigne à suffisance du mépris des pays occidentaux pour les principes fondamentaux qu’ils sont censés promouvoir et défendre.
Sans une mobilisation internationale de très grande envergure, les droits fondamentaux du peuple palestinien continueront à être ainsi bafoués. Le Tribunal Russell sur la Palestine d’une part et l’action BDS d’autre part constituent aujourd’hui deux volets de mobilisation conçus pour rompre le cercle vicieux qui enferme les Palestiniens dans la bantoustanisation de leur pays, tant à Jérusalem, en Cisjordanie qu’à Gaza.
Et attendons-nous sous peu à des manœuvres de la part de ladite communauté internationale en vue de créer, à partir de ces territoires palestiniens complètement disloqués, un État-croupion qui sera tout sauf apte à satisfaire aux droits et aspirations fondamentaux des Palestiniens.
Pierre Galand Président de l’Association belgopalestinienne
A lire : « Palestine : un Etat ? Quel Etat »
De Jean-François Legrain, chercheur CNRS/GREMMO (Maison de l’Orient et de la Méditerranée-Lyon). www.gremmo.mom.fr/legrain/20091211_etat_palestinien.pdf