Par Ahmad Yousef
                          Ahmed Yousef et vice-ministre des affaires  étrangères et ancien conseiller politique du Premier ministre  palestinien Ismail Haniyeh. 
Janvier 2010 marque le quatrième anniversaire du  Hamas au gouvernement après sa victoire aux élections parlementaires de  2006 et la formation de son gouvernement en mars de la même année. Autre  particularité de cette année : elle marque la quatrième année de la  transition réussie du Hamas en parti politique, en dépit des procès et  tribulations rencontrées et imposées par certains membres de la  communauté internationale qui ont tenté de le renverser et de  contrecarrer la démocratie palestinienne.
 Le Hamas avait l’ambition de mettre en œuvre sa Plateforme de Changement  et Réforme, une plateforme qui demandait la fin de la corruption  gouvernementale, la transparence et la participation au gouvernement de  tous les partis politiques.                        
                                                 Il faut le rappeler,  beaucoup des candidats inscrits sur les listes de la plateforme  Changement et Réforme, tant au niveau local que national, étaient des  Palestiniens de tous horizons qui avaient des points de vue et des  affiliations politiques diverses. Les résultats de l’élection de 2006  furent vraiment un signal et un phare de l’exigence palestinienne de  changements et de réformes de gouvernance et des politiques du passé.  L’appel à des changements et des réformes fut entravé par l’ingérence  extérieure dans les affaires internes qui a conduit à la dispersion des  projets réformateurs du Hamas, culminant dans des différends bilatéraux  avec les opposants politiques, en particulier le mouvement Fateh.
 Les gens pragmatiques, rationnels et sages du mouvement ont essayé de  résoudre les défis consécutifs aux élections. Par exemple, le docteur  Azeez Dweik, président du Conseil législatif palestinien (CLP), a  proposé un Programme de Réforme nationale. Le programme conduisait à un  programme d’Accord national. Alors que nous tentions d’appliquer  l’Accord national, des disputes politiques et des conflits armés ont  forcé la direction à se détourner de la réforme intérieure. En  conséquence, la situation sur le terrain devint plus chaotique dans les  mains de l’appareil de sécurité préventive et les flammes du chaos  furent alimentées par l’aide et l’interférence de certains gouvernements  occidentaux, à savoir les Etats-Unis.
 Les Etats-Unis avaient appelé à des élections palestiniennes  démocratiques. Pourtant, lorsque le bloc Changement et Réforme du Hamas a  remporté la victoire, ces appels du gouvernement US à la démocratie  palestinienne se turent et des sanctions économiques furent imposées. Le  peuple palestinien a été puni, économiquement et militairement, pour  avoir exercé son droit et avoir participé au processus démocratique  vénéré par l’Occident. Le comportement de l’administration US ne fut pas  sans rappeler ses initiatives politiques passées suite aux élections de  partis politiques nord-africains et d’Amériques Centrale et du Sud  qu’elle n’appréciait pas. Ce type de comportement n’est pas seulement  antidémocratique, il contrevient aux droits consacrés par la Charte des  Nations Unies qui appelle au respect et à la non ingérence dans les  affaires intérieures des autres.
L’ingérence dans les affaires internes palestiniennes et l’aide au  renversement du gouvernement Hamas ont eu lieu au nom de la soi-disant «  Guerre contre le terrorisme. » La Guerre contre le terrorisme a servi  de prétexte à l’élimination d’un parti politique jugé non conforme aux  intérêts des Etats-Unis, c’est-à-dire au soutien d’« Israël. » Cette  politique fut de plus amplifiée par une collusion régionale et les  attaques israéliennes quotidiennes en Cisjordanie et dans la Bande de  Gaza. En dépit des pressions imposées de l’extérieur, le Hamas, au nom de  l’intérêt national palestinien, a ouvert la porte à la formation d’un  gouvernement d’Unité nationale basé sur l’Accord de La Mecque. Le but de  l’Accord de La Mecque était de mettre un terme aux ingérences  extérieures et de donner aux Palestiniens une chance de bâtir leur  propre système politique démocratique fondé sur la participation, la  transparence et les libertés qui font partie intégrante de la  Déclaration des Droits de l’Homme des Nations Unies.
 Dans le gouvernement d’Unité nationale, un programme politique commun  fut présenté et accepté tant par le Hamas que le Fatah. Ce programme  donnait au Président Abbas mandat pour négocier avec Israël ; les  résultats de ces négociations seraient discutés et approuvés par le  peuple palestinien et, enfin, le droit du peuple palestinien à résister à  l’occupation, reconnu par le droit international, aussi longtemps  qu’Israël continuerait à occuper nos terres en Cisjordanie et dans la  Bande de Gaza, était confirmé.
 Malheureusement, le gouvernement d’Unité nationale n’a pas duré plus de  trois mois et, pendant ce laps de temps, les poursuites contre les  membres du Hamas ont augmenté. Le chaos sur le terrain a conduit à ce  qui est appelé la Prise de pouvoir militaire de juin 2007. Les partis  politiques palestiniens ont fait de nombreuses erreurs pendant cette  période, des erreurs qui ne devraient pas empêcher et n’empêcheront pas  la réunification et la réconciliation palestiniennes.
 Le Hamas a essayé de briser l’isolement politique qui lui était imposé,  ainsi que sur les Palestiniens, en allant en Europe présenter notre  point de vue et nos positions.  Il a continué de discuter avec la «  communauté internationale » par des canaux directs et indirects pour  tenter de restaurer la démocratie palestinienne et parvenir à l’unité  nationale. La division entre la Cisjordanie et la Gaza ne peut perdurer,   car nous sommes frères et sœurs maintenant et dans l’avenir. Nous,  Palestiniens, avec l’aide de nos frères et sœurs du monde entier, nous  vaincrons.
La Bande de Gaza : stabilisation de la sécurité et accalmie La Bande de Gaza n’a pas connu de situation de calme et de sécurité  depuis la création de l’Autorité palestinienne en 1994. La sécurité et  le calme ont cependant été instaurés après les événements de juillet  2007. Tous les visiteurs dans la Bande de Gaza ont été témoins de cette  situation – il n’y a plus de présence militaire dans la rue, on constate  une absence de chaos et de désordre et, finalement, la primauté de la  loi et l’ordre, dans le respect de tous, prévalent.
Les efforts de réconciliation, des efforts sans fin Après juin 2007, la division entre les deux principaux partis, le Fatah  et le Hamas, s’est aggravée. Nombre de pays ont essayé d’intervenir pour  la réconciliation, mais le fossé demeure profond. Ces interventions  extérieures ont été contrecarrées par le soutien implicite et continu  des Etats-Unis à Israël. Entre temps, le Général Dayton a poursuivi la  mise en œuvre de sa vision sécuritaire en Cisjordanie, une vision en  harmonie avec celle d’Israël.
Le document égyptien pour mettre fin à la division palestinienne Depuis plus d’un an, l’Egypte a tenté de réduire le fossé entre le Fateh  et le Hamas. Cet effort a réussi à atténuer les différends et à pousser  chaque bord vers la réconciliation avec une vision agréée par tous les  partis, et pas seulement le Fatah et le Hamas.
 L’atmosphère était propice à la signature de l’accord lors d’une  cérémonie organisée au Caire à la fin octobre 2009. Cependant, les  suites du report du vote sur le rapport Goldstone, suite à une demande  présentée par le Président Abu Mazen, ont engendré un état de confusion  politique et d’accusations qui ont aggravé les relations entre les deux  partis. A cause du tollé qui s’en est suivi et qui a directement touché  le Président Abu Mazen, l’Autorité nationale palestinienne a demandé que  le rapport soit représenté à la discussion et au vote devant  l’Assemblée Générale des Nations Unies.
 Le Caire a adressé le document mettant fin à la division palestinienne  tant au Fatah qu’au Hamas, pour signature. La signature était censée  avoir lieu sans objection, de manière à ce que la réconciliation entre  dans sa deuxième phase. Celle-ci concerne l’application des conditions  stipulées dans le document : former le Comité national suprême,  organiser de nouvelles élections, activer l’OLP, réformer les appareils  sécuritaires et parvenir à une réconciliation interne.
 Le Fatah a signé le document égyptien, tandis que le Hamas a hésité,  demandant des clarifications sur certains points du document. De plus,  on pensait que l’Egypte prendrait l’initiative d’inviter les parties à  une session finale, ou du moins demanderait à toutes les factions à  mettre la touche finale au document. Malheureusement, le Caire a poussé à  la signature du document et a affirmé que les commentaires et les  réserves émis par le Hamas et les autres factions politiques  palestiniennes seraient pris en considération pendant la phase de mise  en œuvre directe de réconciliation sur le terrain.
 La situation a entraîné un arrêt complet de tout dialogue et des efforts  pour parvenir à la réconciliation et à l’unité palestinienne. Nous  avons tous commis des erreurs et leur nature et leur gravité varient.  Malgré cela, nous vaincrons. Aujourd’hui, des initiatives arabes,  libyennes et saoudiennes existent pour surmonter les obstacles qui  entravent la signature du document égyptien pour la réconciliation  nationale. Nous espérons que ces initiatives seront fructueuses  lorsqu’elles seront présentées, pendant le sommet arabe à venir, le 27  mars à Tripoli.
Les défis qui nous attendentLes Palestiniens font face à quatre principaux défis :
1) mettre fin à la fracture interne et ramener l’unité entre la Bande de Gaza et la Cisjordanie,
2) lever le siège imposé à la Bande de Gaza,
3) mobiliser le soutien arabe, musulman et international aux Palestiniens,
4) mettre fin à l’occupation et établir un Etat palestinien libre, souverain et indépendant.
Conclusion
 Il ne fait aucun doute que ces enjeux sont interconnectés et  interdépendants. On ne peut en réaliser un sans les autres. J’espère que  le travail de chacun d’entre nous, et ensemble, permettra d’arriver à  la réconciliation, et à mettre fin à l’occupation israélienne, à la  construction des colonies israéliennes et à l’expropriation des terres  palestiniennes. Il est temps, pour tous les Palestiniens, les Arabes,  les musulmans et les internationaux, de mettre de côté nos différences  personnelles, factionnelles et politiques ; il est temps de ne faire  qu’un, comme frères et sœurs, pour vaincre l’injustice et défendre les  droits consacrés par le droit international et les droits de l’homme  garantis à tous par Dieu. Pour reprendre les paroles de Martin Luther  King, « nous vaincrons. »